Voici dernière lettre échangée dans le cadre de De profundis, le jeu épistolaire inspirée de H.P Lovecraft. Il s’agit de la troisième et dernière réponse de Monsieur Zéta à Monsieur Masurel. (Première lettre et concept du jeu ici). Cette lettre en contient plusieurs sous forme de fragments, envoyés dans une grande enveloppe.
FRAGMENT 3
Me voici à Montréal depuis une semaine. Je ne sais pas dans quoi je me suis embarqué. Chaque nuit, cootoo me guide à travers KADATH et ses rues, tantôt sinueuses, tantôt gigantesques. Coutou s’affaire à relier la dimension onirique et la dimension matérielle de notre univers pour les fondre et les façonner comme de la cire chaude. NYARLATOTHEP guide mon bras et CTHULHU attend au fond des océans que l’évaporation commence. JE me réveille chaque matin dans une rue de la ville, sous le regard réprobateur des passants. Coutoo se met parfois à hurler des insanités dans une langue oubliée, c’est très gênant. J’essaye tant bien que mal d’en faire un spectacle grotesque pour gagner quelques sous, mais c’est sans espoir… Je dois rejoindre Providence ! Quel nom prédestiné ! C’est là-bas qu’aura lieu la conjonction mémétique ! D’autres puppets seront là et comme dans la nef de KADATH, nous défilerons à la suite d’Howard Philip Lovecraft, du Kitab du saigneur et de son golem, et nous suivrons les traces de l’INNOMMEE, la prêtresse par qui sont tirées les ficelles de la réalité ! Je regarderai demain à la gare routière les trajets pour Providence depuis Montréal. Le peu d’argent qui me reste sera consacré à mon pèlerinage dans cette ville, si lointaine et si proche !
Mais quel est ce pays où les forets sont infiniment denses, étendues et les pluies diluviennes ! J’ai du rebrousser chemin à mi-parcours entre Montréal et Providence. Faute d’argent, le chauffeur de bus ne me laissait aller plus loin. Cootoo l’a copieusement insulté, puis nous avons erré le long des routes pour éviter ces forets ou pullulent les bêtes sauvages et où l’homme n’a pas sa place. Ici, la foret est partout, organique, sinueuse, gluante et chaotique, elle s’infiltre dans nos esprits et nous encourage, tels les sorciers indiens, à pratiquer d’ignobles sacrifices pour implorer la bénédiction des élémentaires. J’ai glapi telle une bête immonde et coutou a invoqué la trace de TSATSOGHUA à travers le lichen des étangs et des torrents !!
Nous avons pu rejoindre la civilisation, mais à quel prix !?
Aujourd’hui, nous devons rentrer en France, Cootoo a pu convaincre un membre d’équipage, un vilain bossu rencontré sur les docks de Montréal. Son navire, un porte container, traversera l’atlantique pour Rotterdam. Nous nous glisserons à bord, en échange de quoi nous servirons le rituel quotidiennement, à ces adeptes de l’ombre et de la rouille. Une marée de boue est en marche et rien n’arrêtera son passage ! Monsieur Masurel ! Nous devons vous rencontrer, Cootoo m’a signifié que nous avons beaucoup en commun, que votre femme, tout au moins son enveloppe charnelle nous sera d’un très grand secours pour atteindre le palais de l’inommée et nous retrouver conjointement en KADATH. Quoiqu’il arrive, ne détruisez pas son corps !!!!
Je me rend chez vous dès que possible avec Cootoo ! Nous avons votre adresse. De rotterdam, nous nous rendrons d’abord à Lyon, dans mon ancien appartement. A ce moment là, nous aurons les moyens de réunir l’armée des puppets ! L’infâme SHUBI et ses chiens de Tindalos bavent de rage de n’avoir pu nous suivre en Amérique, mais ils devaient monter la garde… Quoiqu’il en soit, le portail peut désormais être scellé. Nous serons sûrement à Lyon trois semaines après le moment ou vous lirez cette lettre. Si vous avez d’importantes informations à me communiquer, nous pourrons lire le courrier à notre arrivée à Lyon, ensuite, il sera trop tard !
Je mettrais feu à l’appartement, puis je pourrais me fondre dans L’UN, Cootoo, fils de Cthulhu ! faire corps avec la grande rêveuse ! YA ! Nus face à notre destin, nous franchirons à nouveau les kilomètres Monsieur Masurel ! Quoique vous fassiez, ou que vous soyez : tenez-vous prêt ! Sachez qu’un grand destin commun nous attend ! Une fois que vous avez touché le fond, il ne reste plus qu’a donner une petite impulsion et la lente remontée peut commencer… Il faut savoir simplement respecter les paliers de décompression et tout ira bien. Tout ira bien. Monsieur Masurel, tout ira bien.
Étrangement, monsieur Masurel n’a jamais donné de réponse à cette lettre.
C’est donc ici que prend fin cette histoire épistolaire de DE PROFUNDIS, lettres des abysses.